Detlef
Rönfeldt |
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L'Est Éclair, 17.08.1984 Flash-back au Château de La Motte-Tilly La première chaine de télévision allemande s'est
installé au cours des deux mois d'été au château de La Motte-Tilly. Ce fut
l'occasion pour les Nogentais de découvrir les mystères du tournage. Certains
même, ont participé en tant que figurant dans ce feuilleton intitulé: «Ich, Christian Hahn». La visite du château sous la
responsabilité de M. et Mme d'Ussel , n'en a pas été affectée. Les lecteurs de "L'est Eclair" ont put suivre
au cours de nos articles l'évolution du tournage. Après ces longues semaines dans le Nogentais, la
caravane «SWF» a repris le route du retour pour marquer néanmoins une pause
en Alsace. Nous avons rencontré le metteur en scène. Cet homme qui
possède le pouvoir artistique de l'œuvre..., mais qui n'en abuse point. C'est
ce qui en fait sa force. Lorsque l'on arrive sur un lieu de tournage,
toutes les choses prennent des dimensions importantes, les accessoires et
tout le matériel de prises de vues vous transportent dans un pays inconnu.
Plus habituée à voir le produit fini plutôt qu'en "gestation",
c'est avec les yeux d'un enfant devant son premier jouet que l'on pénètre à
pas feutrés dans les coulisses du cinéma. Comme pour ne pas déranger et
surtout éviter de se trouver à un endroit précis, couvert par la caméra. Dans cette atmosphère professionelle, on n'ose pas interrompre la personne que
l'on désire interviewer. Surtout lorsque celle-ci est le metteur en scène! Difficile de
rencontrer Rönfeldt Détlef
[sic!]. N'imaginez surtout pas que l'homme se prend au sérieux et tente d'imiter ses collègues américains
au long cigare. Il n'en est rien et c'est tant mieux: A la Motte-Tilly, en
compagnie de la télévision allemande, nous sommes bien loin de cette triste
vérité. Mais à raison de douze, voire quatorze heures par jour de présence
sur le terrain, Rönfeldt Détlef
a très peu de temps à consacrer aux journalistes. Néanmoins, à force de
persévérance, nous sommes parvenus à l'extraire de son film le temps d'une
pause d'une demi-heure. La sacrifice d'un repas au prix d'une interview. La caméra zoom-avant L'action se déroule
sous les feuillages énigmatiques des sous-bois du château de la Motte-Tilly.
Après plusieurs échecs, l’angoisse de déranger celui que l’on recherche est
envolée. Ca commencait plutot
mal, mais il existe une espèce d’hommes qui, grace
à un simple sourire, savent vous faire oublier toutes vos appréhensions en
vous mettant à l’aise. Rönfeldt Detlef est du genre de type
qui n’alimente pas les journaux spécialisés. Un homme discret mais efficace! Gros plans sur lui Du haut du château ou d’hélicoptère, le metteur en
scène est pris à son propre jeu. Il est filmé par la caméra de nos yeux,
comme il est précisé dans le script, une lumière tamisée et un flou
artistique. Pas de gestes
démesurés, pas die phrases haut en couleur, le metteur en scène s’exprime
simplement, avec une gentillesse sans égal. La barbe bien taillée,
coupe de cheveux moderne, Rönfeldt est un homme de
trente-cinq ans. L’œil perçant et scintillant, il sait être fin
psychologique. Depuis quatre ans, il
se consacre entièrement à la réalisation de séries télévisée :
« J’ai, dit-il dans un français parfait, fait trois feuilletons. C’est
un travail qui me passionne. » Devenu spécialiste
dans son art, il a «enfanté» des feuilletons principalement contemporains.
« Ich, Christian Hahn » est son premier dans le genre historique.
« C’est une expérience, qui me plait. J’aime travailler sur un scénario
nous ramenant dans le temps. La télé m’intéresse dans le sens où j’essaie
d’apporter dans mes productions le style « télé » qui lui manque
justement. Enfin, à mon gout,. Mais nous avons un faible budget et très peu
de temps. C’est pour cela que l’on ne peut rivaliser avec le cinéma. Nous
avons, pour cette série, cinq mois de tournage, puis environ quatre mois pour le découpage des plans et les
raccords. Le film sera présenté au printemps ou en été. Alors que Rönfeldt se confie, sur la bande de nos oreilles, les
oiseaux et le bruit des branches d’arbres apportent le fond sonore que l’on
retient dans les bouts d’essaies, tournés à l’extérieur. Flash-back ou retour en arrière La conversation se
poursuit. Au lieu de me laisser avec ces informations déjà suffisants pour
faire un papier, le metteur en scène enchaine sans transitions sur ses
débuts. Au loin, les coups de fourchettes, des techniciens et des acteurs
semblent l’appeler, mais lui ne les entend pas. Il se consacrera encore à
cette interview, avalant entre deux phrases les bouchées d’un pain au
chocolat pour tout déjeuner. Avec un certain
acuité, il perdra son regard dans le rétroviseur de sa mémoire éclairée par
deux projecteurs éclatants. « J’ai commencé
comme assistant metteur en scène, il ya une douzaine d’années à Hambourg. Mais
avant de franchir ce pas décisif, j’avais effectué à dix-neuf ans mon premier
court-métrage et des études de lettres que j’ai interrompues. Pendant mes
congés, j’ai travaillé comme homme à tout faire pour un metteur en scène. Il
m’a appris beaucoup de choses. Puis, toujours pour la télévision, on m’a
offert ce travail à Hambourg comme assistant metteur en scène. » Continuant son
apprentissage, Rönfeldt a franchi une à une les
marches qui l’ont conduit à la place de « régisseur », comme il a
dit outre-Rhin. Autre séquence… autre scène Actuellement au sommet
de son art en tant que réalisateur de séries, Rönfeldt
Detlef se verra confier, l’an prochain, le tournage
d’un long métrage. Un téléfilm de quatre vingt dix minutes. Une nouvelle
promotion qui fait partie de la courbe ascendante de cet Allemand en quête,
secrètement, d’une place sous le soleil du Dieu cinéma. Néanmoins, le passage
de l’un à l’autre n’est pas toujours évidemment, surtout pour un homme qui
peut etre catalogué de spécialiste
« télé ». En abordant le thème
du cinéma, il ne peut s’empêcher de citer le Français François Truffaut et
l’Allemand Lubitsch qu’il admire. En tout bon professionnel, Rönfeldt regarde un film avec l’œil du spécialiste. Il
nous parle du cinéma allemand : « Notre cinéma est admiré à
l’étranger mais, à mon avis, il manque de talent dans la comédie. » Les vidéo-clips
prennent une place importante désormais dans la réalisation. Pour Rönfeldt, ce nouvel art ne bouleversera pas la mise en
scène à proprement parler : « Mais ils apporteront dans les jeux de
caméra et de lumière. Je les compare à des films publicitaire. » Travelling avant, sur une profession Le métier de metteur
en scène réclame de l’expérience et des nerfs à toute épreuve. Tout au long
de la journée, lors des différentes scènes. Rönfeldt
pense et repense à la vitesse grand V toutes les situations. La discussion
n’arrête pas entre lui, son caméraman et son assistant Roger Wielgus qui opère pour la première fois à ce poste avec
la ferme intention de bien réussir sa mission. Ce Français tient un rôle
fondamental, puisqu’il est le médiateur indispensable entre les acteurs,
figurants et le metteur en scène : « Le métier de metteur en scène
me plaît car il est important sur le plan du contact humain. Nous travaillons
en concertation et j’ai besoin de tout ces rapports. Je me considère tout
simplement comme un artisan », précise Rönfeldt. Répérant chaque angle, mettant chaque personnage à une place
donnée avant la répétition, le metteur en scène compose son image en prenant
soin de l’esthétique à apporter. Chaque morceau de plan est déchiqueté. Un
travail aussi long que rigoureux. Et de la rigueur. Rönfeldt
n’en manque pas. Malgré toutes les
responsabilités qui pèsent sur son épaule, Rönfeldt
Detlef ne tombe pas dans le piège de l’homme
débordé et excécrable. Il sait rester humble devant
la vie, devant sa profeesion qu’il exerce avec
talent. Amoureux de la France, une expérience dans notre langue et dans notre
pays ne serait pas pour le désinteresser (à bon
entendeur…). A la Motte-Tilly, j’ai
rencontré beaucoup plus qu’un metteur en scène. Un homme sensible et
émotionnel, qui donne une âme et, pour tout dire, une utilité artistique à
des feuilletons impressionnés sur de stupides bouts de pellicules. Rönfeldt est un de ces artistes, mais aussi un grand humaniste.
Alors, la caméra zoom arrière sur un dernier plan de Rönfeldt
Detlef qui est retourné dans le film de sa vie. Ainsi soit-il… Pascal Hébert |